Environ 500 000 personnes souffrent de schizophrénie en France. Pour les patients qui présentent des troubles dépressifs, un lien avec une perturbation du microbiote intestinal est avancé par un nombre croissant de spécialistes. La transplantation de microbiote fécal pourrait-elle alors être une alternative thérapeutique intéressante ? Des chercheurs souhaitent explorer cette voie.
Du microbiote intestinal à la schizophrénie
Actuellement, la transplantation de microbiote fécal, une thérapie récente, est indiquée uniquement dans des contextes de pathologies digestives :
- Des maladies inflammatoires chroniques de l’intestin (rectocolite hémorragique, maladie de Crohn) ;
- La réaction du greffon contre l’hôte (complication de certaines greffes) ;
- Les infections compliquées ou récidivantes à Clostridium difficile (un agent pathogène responsable de diarrhées chroniques).
Mais de plus en plus d’études soulignent l’implication des dysbioses intestinales (perturbations du microbiote intestinal) dans le développement de nombreuses pathologies et problèmes de santé, même non digestifs. Parmi ces pathologies, pourraient se trouver la schizophrénie et les troubles dépressifs associés.
Une perturbation du microbiote intestinal à l’origine de troubles mentaux
Récemment, des chercheurs marseillais ont compilé l’ensemble des données disponibles sur l’intérêt des traitements axés sur le microbiote intestinal dans la dépression et la schizophrénie. Cette revue de littérature met en évidence que les sujets atteints de dépression ou d’anorexie mentale présentent une diminution de la diversité et de la richesse du microbiote intestinale. Et la dysbiose est d’autant plus importante que les symptômes sont sévères.
Chez les patients schizophrènes, le risque de dépression est multiplié par cinq par rapport au reste de la population. Les troubles dépressifs associés à la schizophrénie aggravent souvent l’évolution de la maladie mentale, entraînant :
- Une augmentation des douleurs ;
- Une augmentation des troubles métaboliques ;
- Une moindre adhésion au traitement ;
- Une altération aggravée de la qualité de vie.
Les données récentes apportent des arguments en faveur d’une dysbiose intestinale chez les patients schizophrènes atteints de troubles dépressifs. Si les probiotiques peuvent constituer une option thérapeutique possible sur le court terme, serait-il envisageable de traiter ces patients avec une transplantation de microbiote fécal ?
Un intérêt pour la santé physique et mentale
Peu d’études ont été jusqu’ici publiées sur la transplantation de microbiote intestinal pour traiter des pathologies non digestives. Elle pourrait constituer une approche prometteuse chez les patients schizophrènes avec troubles dépressifs. En effet, elle aurait un bénéfice durable apporté en une seule intervention et présenterait un rapport bénéfice / risque plus avantageux que les traitements médicamenteux habituels.
Près de la moitié des patients dépressifs sévères ne répondent pas favorablement aux traitements psychotropes, un chiffre parfois supérieur dans la population schizophrène. De plus, la transplantation de microbiote fécal pourrait améliorer la santé physique des patients schizophrènes. Plus de 25 % des patients présentent une obésité abdominale associée à une dysbiose intestinale et environ 30 % montrent une inflammation chronique à bas bruit. La transplantation de microbiote fécal chez les patients schizophrènes avec troubles dépressifs pourrait être une alternative thérapeutique intéressante à la fois pour la santé mentale et physique de ces patients.
Estelle B., Docteur en Pharmacie