Et si les technologies du numérique empruntées au secteur des jeux vidéo pouvaient aussi aider les personnes atteintes de troubles psychiatriques ? En explorant cette piste, des chercheurs britanniques ont réalisé une étude montrant qu’en discutant avec un avatar numérique, un patient atteint de schizophrénie voient ses hallucinations auditives diminuer nettement. Retour sur les travaux publiés récemment dans la revue britannique Lancet Psychiatry.
Vers une disparition complète des voix
Entre 60 et 70% des schizophrènes souffrent d’hallucinations auditives. Malgré la prise de médicaments efficaces, 25% de ces individus continuent à subir l’assaut d’hallucinations auditives.
À savoir ! Le médicament le plus utilisé pour traiter les hallucinations auditives est l’olanzapine. Ce neuroleptique dit atypique possède des effets indésirables moins importants que ceux des neuroleptiques classiques. Il a des propriétés antipsychotiques et agit également comme régulateur de l’humeur.
Comment les soulager de ces voix persistantes grâce aux nouvelles technologies ? C’est à cette question que la thérapie AVATAR, inventée par Julian Leff en 2008, tente de répondre.
Le principe est simple : la personne souffrant de ces hallucinations dialogue avec une représentation numérique, autrement dit un avatar, représentant son persécuteur imaginaire.
Récemment, une étude de six mois, menée par Tom Craig de l’université King’s College de Londres, a mesuré les bénéfices d’une thérapie AVATAR sur le recul des hallucinations auditives sur 131 patients atteints de schizophrénie et toujours sous prescription médicamenteuse.
Résultats au bout de 12 semaines et 300 minutes de discussion avec l’AVATAR ?
Comparativement au groupe témoin, ne recevant uniquement qu’un soutien psychologique, les personnes bénéficiant de la thérapie AVATAR ont vu la fréquence et l’intensité de leurs hallucinations auditives diminuer.
Plus remarquable encore : sept d’entre eux affirment ne plus entendre les voix.
Autres points positifs : aucun effet indésirable n’a été observé et les bénéfices de la thérapie AVATAR se sont prolongés sur une période de 6 mois.
Une voix effrayante qu’il faut dominer
En moyenne, les personnes schizophrènes participant à cette étude entendent de 3 à 4 voix différentes et dans 85% des cas, elles sont personnifiées. C’est-à-dire que le patient est convaincu que cette voix possède des propriétés humaines.
Avec cette personnification, le schizophrène entretient des relations personnelles avec ces voix mais ce sont des échanges marqués par une toute puissance de la voix.
Pour aller au bout de cette personnification, les chercheurs ont tenu à ce que le patient lui-même conçoive son avatar en choisissant notamment le son de sa voix, son type de discours ou encore son apparence.
Avec la thérapie AVATAR, il est désormais possible de matérialiser cette voix et de faire progresser le dialogue avec elle par l’intermédiaire du psychiatre qui oriente la discussion.
L’objectif pour le thérapeute est de faire en sorte que cette voix devienne plus conciliante avec le patient.
« On passe de quelque chose de très effrayant à quelque chose qui est sous le contrôle de la personne schizophrène », affirme Tom Craig dans un communiqué de presse du King’s college.
Avant d’être proposée en routine chez les patients atteints d’hallucinations auditives persistantes, la thérapie AVATAR doit être étudiée sur un plus grand nombre de personnes schizophrènes.
Julie P., Journaliste scientifique
– Des avatars virtuels aident les schizophrènes à lutter contre leurs voix. Le Quotidien du Médecin. Dr Irène Drogou. Le 24 novembre 2017.
– Eurekasanté Vidal. Olanzapine Biogaran. Consulté le 13 décembre 2017.